En restauration de tangka, le nettoyage a une incidence directe sur l’étape suivante de réintégration. Il est souhaitable qu’il se fasse en plusieurs phases, et même parfois parallèlement.
La parcellisation très définie des zones colorées et leur contraste optique sont déroutants pour le restaurateur qui ne les rencontre pas dans la peinture occidentale.
De plus, la peinture tibétaine est toujours largement ombrée de teintures colorées souvent appliquées en surface, et qui se révèlent très vulnérables au nettoyage, de la même façon que le seraient les glacis occidentaux. Ces ombres colorées ont souvent été amoindries par la lumière ou même ont disparu sous des couches de vernis, ou encore ont été effacées par frottement ; les distinguer, ou les deviner, est une tâche des plus délicates.
Il faut tenir compte de ces particularités et les intégrer dans la conception globale du nettoyage pour respecter les différents plans qui construisent l’œuvre, et lui donnent toute sa richesse. L’image est, contrairement à certaines idées reçues, presque toujours exprimée en volumes. Les ombres sont appliquées en lavis coloré, juxtaposé aux zones claires, elles-mêmes soulignées par un trait blanc.
Par un simple dépoussiérage ou gommage mécanique, on éliminera régulièrement ce qui recouvre la couche picturale ; opération relativement aisée mais non sans danger, au cour de laquelle le mouvement de la main doit être strictement contrôlé. Remarquons que certains composants peuvent, par leurs résidus, avoir un effet néfaste sur la peinture. (Voir étude d’E. Grosso concernant l’intervention de gommage : Conservation Restauration n°8, Oct. 1996)
Parfois un traitement à l’aide de solvants volatils permettra d’alléger certaines zones superficielles assombries, mais cette phase particulièrement délicate sera pratiquée couleur par couleur. Par exemple, si le pourcentage de teinture est très important, l’approche du nettoyage se fera avec la plus grande prudence. Dans le cas exemplaire d’une surface d’orpiment altérée, l’équilibre du nettoyage sera extrêmement difficile à obtenir. Si son allègement se fait trop brutalement, il endommagera la surface.
Chaque cas de conservation impliquera une solution :
La constitution même du tangka dirige la conception de la conservation/restauration.
Re-fixer une œuvre ancienne aqueuse, et souple avec des produits synthétiques apparaît souvent inadapté, la peinture tibétaine ayant une qualité technique intrinsèque : elle peut être régénérée avec des colles naturelles très légères, analogues à celles qui la constituent.
De la même façon, la méthode du fil à fil utilisée en restauration occidentale permet de reconstituer la trame de l’œuvre — si elle est pratiquée avec soin sur table lumineuse — et s’impose comme une solution peu interventionniste.
En principe, le doublage doit être proscrit. Dans certains cas, l’oeuvre n’a pas besoin d’autre intervention que le fil à fil.
La toile de l’incrustation doit être enduite sur ses deux faces afin de restituer à l’ensemble son homogénéité.
La réintégration d’enduit teinté devra se faire avec le plus grand soin au dos en respectant le graphisme, les consécrations, les mantras. Les matériaux composant l’enduit devront être de densité et de force légèrement inférieures à ceux de l’œuvre originale. Ainsi l’adaptation aux tensions mécaniques naturelles de la peinture et la réversibilité seront optimales.
Les enduits et les éléments servant à la réintégration de la couche picturale devront être fabriqués et contrôlés par le restaurateur.